Entre documentaire et fiction, « Aya » et une très jolie réussite, débordant d’humanité
Aya (2021)
Ecrit et réalisé par Simon Coulibaly Gillard
Avec Marie-Josée Kokora, Patricia Egnabayou, Junior Asse, Eli Kokora,…
Produit par Sébastien Andres, François-Pierre Clavel et Alice Lemaire pour Michigan Films et Kidam
Direction de la photographie : Simon Gillard / Montage : Bertrand Conard et Marie-Hélène Mora
Docu-fiction / Drame
90mn
France / Belgique
Aya (Marie-Josée Kokora) est une adolescente vit avec sa mère (Patricia Egnabayou) et son petit frère Eli sur l’ile de Lahou, au large d’Abidjan, en Côté d’Ivoire. Alors que les vagues caressent le sable à quelques mètres de leur maison construite en bois sur la plage, Aya vit ses derniers moments d’innocence tandis que sa mère, veuve et avec deux enfants à charge, se bat pour survivre.
« Aya » est un docu-fiction. Comprenez par là qu’il a été réalisé avec des méthodes documentaires sans scénario pré-construit mais qu’il s’agit bien d’une reconstitution avec des acteurs, même s’ils tous recrutés sur place et qui jouent un rôle proche de ce qu’ils sont dans la vraie vie.
Le réalisateur de « Aya », Simon Coulibaly Gillard est un Breton qui lors de ses études en prépa de mathématique, décroche et décide de partir à Tombouctou. Ce voyage impromptu va être une révélation pour Gillard qui a tourné cinq courts et moyen métrages, tous sur le continent africain. Alors qu’il préparait son premier long métrage en Belgique, une histoire d’amitié entre deux femmes, de moto et de bitume, il sent qu’il est coincé. Il repart en Afrique et là tombe par hasard sur l’île de Lahou. Un paradis mais en cours de disparition. La mer monte, obligeant les habitants à déplacer leurs maisons… mais aussi leurs cimetières, une épreuve pour un peuple aux fortes croyances chrétiennes.
Simon décide de rester à Lahou et de raconter l’histoire de ces habitants avec eux. Il passe un an sur place à comprendre les habitants, trouver son héroïne et filmer seul son histoire (son, image, direction des acteurs) avec juste un collaborateur qui s’occupe de l’intendance.
L’exploit est que son film entre documentaire et fiction, une solution pas facile, respire la cohérence. Gillard filme la beauté paradisiaque mais sa caméra reste le plus proche de ses personnages, et notamment de sa superbe héroïne Aya. On en vient à oublier le côté documentaire, d’ailleurs Gillard prend soin de ne pas ajouter de voix off, de ne pas épiloguer sur la montée des eaux (vue par les habitants comme une volonté divine) et de laisser de la liberté à l’imagination du spectateur. Ne vous attendez pas à une analyse, à des faits, l’histoire est racontée du point de vue humain, du point de vue des habitants de Lahou.
Le résultat est un petit miracle d’humanité. « Aya » s’adresse à tous, et grâce à un regard et un montage intelligents, il réussit pleinement son pari : nous raconter une histoire, des histoires, de la plus belle façon qui soit. Et quels personnages, quels acteurs. Il ne suffit pas d’être, il faut aussi savoir le retranscrire à l’écran. Et à cet égard Marie-Josée Kokora (Aya) et Patricia Egnabayou (sa mère) sont époustouflantes.
Dans les salles françaises depuis le 14 octobre 2022.