Un film de gangsters revisité par Ferrara sur le mode d’une tragi-comédie shakespearienne. Christopher Walken et New York y sont époustouflants

King of New York (1990)

Réalisé par Abel Ferrara

Ecrit par Nicholas St. John

Avec Christopher Walken, David Caruso, Laurence Fishburne, Victor Argo, Wesley Snipes, Janet Julian,…

Direction de la photographie : Bojan Bazelli / Production design : Alex Tavoularis / Direction artistique : Stephanie Ziemer / Montage : Anthony Redman / Musique : Joe Delia et Schoolly D

Produit par Augusto Caminito et Mary Kane pour Reteitalia et Scena International

Crime

103mn

Italie

Frank White (Christopher Walken) sort de prison après cinq ans passés sous les verrous. Il est bien décidé à faire le ménage. Entouré de son second Jimmy Jump (Laurence Fishburne) et de son avocate et amante Jennifer (Janet Julian), il doit se battre avec les factions rivales mais aussi la police avec pour ambition de devenir le roi de New York et de financer un hôpital. Mais il sait que le temps lui ait compté…

En signant « King of New York », Abel Ferrara s’essaie à la production léchée, grand spectacle. Une première pour ce réalisateur indépendant et qui tient à sa liberté. L’idée du film lui serait venue du succès de « Terminator » (1984) et de sa compréhension des attentes du public. De fait, il signe ici un film plus « hollywoodien » au niveau formel, et « King of New York) partage des qualités de rythmé et de violence des succès des années 80 – « Terminator » donc, mais aussi « Scarface » (19983 ) auquel par sa thématique il est plus facile de le comparer.

Mais Ferrara n’est pas Cameron, ni De Palma. La photographie de Bojan Bazelli est superbe, mais pour Ferrara un tel travail sur l’image reste du factice, de la surenchère (« Personnellement ça m’ennuie. C’est une façon bourgeoise de faire des films » dit Ferrara dans une interview présente sur le blu-ray édité par Carlotta). Ce qui’ n’est pas grave car Ferrrara n’essaie pas de faire dans le réalisme, mais dans le spectacle et se fiche de toute vraisemblance. Le ton de « King of New York » vire au tragi-comique avec une pointe de folie shakespearienne. Ce qui l’intéresse c’est de montrer l’évolution de sa ville, New York, véritable personnage central du film, rongée par la vacuité de l’argent.

Frank White est un personnage intéressant qu’on peut voir de deux façons : un parrain qui tente de faire du social pour se donner une bonne conscience, mais reste un tueur de sang froid OU (et c’est l’image qu’il veut donner de lui-même) un parrain qui ne s’en prend qu’aux méchants (les autres gangs) et tente de faire du bien avec le trafic inévitable de drogue dans le temps qu’il lui reste.  Au spectateur de faire son choix. Par contre, les autres personnages du film sont bien plus linéaires et c’est dommage.

« King of New York » est en tout cas un film assez hypnotisant et dont la réussite tient sur les épaules d’un Christopher Walken bluffant et sur la capacité de Ferrara à donner vie à New York par les images mais aussi le son. Ce qui ne l’empêchera pas d’être un semi échec à sa sortie. Ferrarra n’a pas vraiment réussi son pari commercial et il ne faut pas s’étonner de le revoir deux ans plus tard dans un « Bad Lieutenant » bien plus brut de décoffrage (et c’est un style qui lui convient mieux).

Petit détail amusant, « King of New York » n’est pas un film américain mais est produit à 100% par le réalisateur et producteur italien Augusto Caminito qui a signé un chèque de plus de 5 millions de dollars pour que Ferrara puisse faire son film comme il l’entendait. Ferrara lui rend d’ailleurs hommage en ouvrant le générique par « An Augusto Caminito Film ».

A noter que l’éditeur Français Carlotta a sorti une très belle édition collector (avec version 4K disponible pour ceux qui sont intéressés plus des goodies) ou en blu-ray simple.

BR FR. Studio Carlotta (2021). Version originale sous-titrée en français et version française. Bonus : interviews d’Abel Ferrara et d’Augusto Caminito