Un thriller horrifique glaçant, réalisé avec une maitrise indiscutable par un jeune Steven Spielberg

Duel (1971)

Réalisé par Steven Spielberg

Ecrit par Richard Matheson d’après sa nouvelle

Avec Dennis Weaver, Jacqueline Scott, Eddie Firestone, Lou Frizzell,…

Direction de la photographie : Lou Frizzell / Direction artistique : Robert S. Smith / Montage : Frank Morriss / Musique : Billy Goldenberg

Produit par George Eckstein pour Universal Television

Première diffusion le 13 novembre 1971

Thriller / Horreur

90mn (74mn dans sa version originale)

USA

David Mann (Dennis Weaver), un monsieur tout le monde, commercial de profession, doit se rendre à un rendez-vous professionnel. Il prend sa voiture le matin et s’apprête à faire ses quelques heures de trajet aller-retour avant de rejoindre son foyer dans la soirée. Il s’est disputé avec sa femme la veille, et sa mère vient diner le soir. Mais sa journée, déjà passablement difficile, va prendre un tournant horrifique et absurde quand il va se faire pourchasser sans raison par un camion qui semble bien décidé à le tuer !

Quand Steven Spielberg réalise « Duel », parfois présenté un peu rapidement comme son premier film, c’est déjà un réalisateur expérimenté. Il avait mis en scène son premier long métrage « Firelight », une histoire de soucoupe volante qui attaque une petite ville américaine, en 1964, tout juste âgé de 17 ans. Il n’en reste que des fragments et le film n’est jamais sorti dans les salles. Il avait réalisé son premier court à 13 ans et à partir de 1969 il a commencé à travaillé pour la télévision américaine sur des séries (dont un épisode de « Columbo »). Il est passé au format téléfilm avec Duel et réalisera son premier film cinéma, effectivement sorti sur les écrans trois ans plus tard avec « Sugarland Express », puis il enchainera avec la consécration « Jaws » en 1975, âgé de 29 ans.

Mais on peut être excusé d’oublier que « Duel » est « juste » un téléfilm vu que celui-ci a tous les atouts d’un film cinéma, très maitrisé, à voir d’ailleurs de préférence sur grand écran. Et c’est bien sous cette forme, rallongé de 16 minutes et en format  widescreen 1.85:1, qu’il est sorti en Europe l’année suivante.

L’histoire est des plus simples, adaptée d’après sa propre nouvelle par le déjà vieux briscard Richard Matheson, écrivain ultra prolifique, auteur entre autres de nombreuses nouvelles et des romans fantastique mythiques « I am a Legend » et de « The Incredible Shrinking Man ». Il est passé scénariste au milieu des années 50 et a alors travaillé notamment pour Roger Corman (« Pit and the Pendulum » en 1961 ou encore « The Raven » en 1963). On lui doit également des épisodes de « The Alfred Hitchcock Hour » et de « The Twilight Zone ».

« Duel » aurait pu être d’ailleurs un épisode de l’une de ces mythiques anthologies. Mais Matheson et Spielberg ont réussi à en faire un véritable long métrage, avec une tension qui ne se dément pas et qui s’achève dans un climax très réussi. Les scènes rajoutées pour la version cinéma (la conversation téléphonique avec sa femme notamment) donnent plus d’épaisseur au personnage de Mann et à sa lutte, métaphore de sa vie dont il est une victime constante (et consentante par sa passivité).

Mann se retrouve face à un adversaire de métal mystérieux et inquiétant (on ne voit jamais le visage du conducteur), le monstre ultime, l’incarnation mécanique du harcèlement et de la brutalité dont cet homme instable et torturé a été de toute évidence une victime dès son enfance (on le voit d’ailleurs maltraité dans le film aussi bien par sa femme, des enfants dans un bus que les routiers dans le resto paumé où il se retrouve après sa première grosse confrontation).

Un homme face à l’indicible sur les roues désertiques et sans fin. Un cauchemar très américain. Un vrai film d’horreur, angoissant à souhait. Et une réussite incontestable pour le jeune Spielberg.

DVD et Blu-ray FR. Studio Universal Pictures France (2015). Version originale sous-titrée en français et version française. Bonus : Entretien avec Steven Spielberg, « Steven Spielberg et le petit écran », « Richard Matheson : l’écriture de Duel »