Un thriller érotique américain avec une Kathleen Turner sublime en jeune femme qui a une double vie pour satisfaire son besoin de contrôle

Crimes of Passion (1984)

(Les jours et les nuits de China Blue)

Réalisé par Ken Russell

Ecrit par Barry Sandler

Avec Kathleen Turner, Anthony Perkins, John Laughlin, Annie Potts,…

Direction de la photographie : Dick Bush / Direction artistique : Stephen Marsh / Montage : Brian Tagg / Musique : Rick Wakeman

Produit par Barry Sandler

Thriller / Erotique

107mn

USA

China Blue (Kathleen Turner) est une prostituée la nuit mais la journée elle est Joanna, une designer qui conçoit des vêtements féminins. Son patron pense que c’est peut-être elle qui a vendu des modèles à l’un de ses concurrents, et demande à Bobby (John Laughlin), un père de famille qui a besoin d’argent, de la suivre. Donny découvre son secret mais est fascinée par China Blue. Ce n’est pas le seul. Un révérend (Anthony Perkins) la suit partout dans l’espoir de sauver son âme.

Le film est à l’origine un scénario de l’Américain Barry Sandler. Sujet qu’il a développé à partir de la fin des années 70 en constatant les difficultés relationnelles dans les couples et comment le sexe en fait est utilisé comme un moyen de créer des distances et d’éviter l’intimité. Il a en était environ à la 40e version quand sur les conseils de son agent, il a proposé le film à Ken Russell, connu pour son goût pour la provocation.

Après des années 70 qui lui convenaient à merveille, Ken Russell semblait faire une pause au début des années 80. Il n’avait pas tourné depuis « Altered States » (1980). Pour l’époque nul doute que le film était provocateur (les thrillers érotiques n’étaient pas encore à la mode aux USA – il faudra attendre encore huit ans et un certain « Basic Instinct » pour renverser la donne). Et Kathleen Turner a eu du courage de prendre le rôle, contre l’avis de son entourage.

Il était évident que le film allait être classé X. Mais le studio New World qui finançait le film, exigea des coupures pour qu’il obtienne un R (Restricted). Une grossière erreur qui évidemment nuisit à « Crimes of Passion » qui fut boudé à la fois par le public et la critique. Heureusement il sortit en version non censurée en vidéo.

Le résultat reste mitigé. « Crimes of Passion » est un portrait original d’une jeune femme mystérieuse qui est prostituée non par besoin financier, mais par besoin de se protéger en isolant sa vie réelle, où elle affiche froideur et distance, et sa vie sexuelle où tous les fantasmes sont permis. Mais Joanna et China Blue sont toutes deux dans le contrôle permanent.

Mais ses rencontres avec le boy-scout Bobby et un soit-disant révérend vont lui faire perdre pied, car dans les deux cas le jeu va plus loin qu’elle ne s’y autorise. Le problème c’est justement ces deux personnages masculins beaucoup trop caricaturaux et qui forment les deux extrêmes de la folie américaine.

Bobby, évidemment l’un des meilleurs joueurs de football américain de son université, à épouser l’une des cheerleaders Amy (Annie Potts), et ils ont deux enfants. Leur vie sexuelle est au point mort, mais Bobby se voile la face et Amy refuse se mure dans le silence. Evidemment quand il va rencontrer China Blue, il va tomber amoureux de cette jeune femme mystérieuse et libérée sexuellement.

Peter, le pseudo-révérend, est joué par Anthony Perkins, et pourrait bien être un cousin de Norman Bates. Equipé de sa bible et d’un godemichet métallique, il est obsédé par le fait de libérer Joana de sa perversion en détruisant China Blue. Il va jusqu’à louer la chambre d’hôtel mitoyenne à la chambre de China Blue et construit un autel à sa gloire (autel que d’après le scénariste Anthony Perkins aurait créé lui-même).

J’avoue aussi que j’ai un petit soucis avec la musique de Rick Wakeman, compositeur anglais et qui avait également signé la musique de « Lisztomania » (1975) pour Ken Russell. Ce n’est pas très rare pour ces années-là mais sa musique a assez mal vieillie. J’espère qu’elle vous conviendra mieux qu’à moi.

« Crimes of Passion » reste un film intéressant sur la prostitution et Kathleen Turner est excellente dans le rôle principal. Ken Russell reviendra sur le thème de la prostitution, dans un esprit beaucoup plus réaliste et anti-« Pretty Woman » avec son film « Whore » (1991) qui lui aussi livre un très beau portrait de prostituée, cette fois-ci bien différente avec Liz (interprétée par Theresa Russell), une mère isolée et fauchée, harcelée par son souteneur.

DVD FR. Studio Sidonis Calysta (2011). Version originale sous-titrée en français et version française. Bonus : interview avec l’actrice et réalisatrice française de porno, Olvidie