Chef d’oeuvre du thriller paranoïaque, le film de Coppola brille par son écriture et une attention méticuleuse au moindre détail. Sans oublier la prestation de Gene Hackman !

The Conversation (1974)

Ecrit et réalisé par Francis Ford Coppola

Avec Gene Hackman, John Cazale, Allen Garfield, Frederic Forrest, Cindy Williams, Harrison Ford, Robert Duvall,…

Direction de la photographie : Bill Butler / Production design : Dean Tavoularis / Montage : Richard Chew / Musique : David Shire

Produit par Francis Ford Coppola

Thriller

113mn

USA

Coincé entre deux géants, « The Godfather » (1972) et « Apocalypse Now » (1979),  « The Conversation », sorti en 1974 comme la suite du Parrain, pourrait presque apparaitre comme un petit film intimiste. Thriller paranoïaque « low key », le film vaut quand même à Coppola une palme d’Or à Cannes. A titre personnel, « The Conversation » est une madeleine de Proust. Un film que j’ai découvert adolescent sur Canal Plus et que je n’avais jamais revu jusqu’à aujourd’hui. Trop peur d’être déçu.

Pas de faux suspense, j’ai adoré revoir « The Conversation » qui pour moi est LE chef d’oeuvre de Coppola. Et probablement l’un de ses films les plus personnels. Coppola fait d’ailleurs remonter les prémices du film à son premier court métrage « No Cigar » (1956) tourné à 17 ans avec son oncle dans le rôle d’un homme solitaire, une ébauche du personnage d’Harry Caul, un spécialiste de l’écoute clandestine, aussi efficace que discret et taiseux. .

Car l’un des attraits de « The Conversation » est son personnage central, superbement campé par Gene Hackman. Un homme solitaire et toujours inquiet qu’on en sache trop sur lui. Tellement secret qu’on en saura un tout petit peu plus sur Caul à l’occasion d’un rêve (sur son enfance) ou via l’insistance de son concurrent (sur son passé à New York). L’homme est torturé. Sa paranoïa l’empêche d’avoir toute relation personnelle que ce soit avec son collègue Stan (John Cazale) ou sa petite amie. Quand cette dernière le presse des questions, il s’éclipse. Paranoïaque ? La seule fois où il baisse la garde, il le paie cher.

Le spectateur assemble les pièces de puzzle comme Caul tente de le faire avec les bribes de dialogue qu’il enregistre et qu’il nettoie afin de les rendre compréhensibles. Quelques mots de cette discussion d’un couple en apparence ordinaire suffisent à déclencher sa paranoïa. Le commanditaire de l’enregistrement est le directeur d’une société quelconque. Ill n’en sait pas plus. Et d’ailleurs a-t-il besoin d’en savoir plus ? C’est juste un client. Mais le traumatisme qu’il a vécu à New York quelques années auparavant creuse son âme qu’il tente d’apaiser vainement à coup de bondieuseries.

L’ouverture du filme st un modèle du genre. Une vue plongeante sur Union Square.à San Francisco. On entendent un orchestre et les gens qui discutent, parfois interrompus par des bruits électroniques. La caméra se rapproche lentement, suit un mime qui se met à tourner autour du personnage d’Harry Caul. Le mime abandonne sa poursuite tandis que Caul s’éloigne. Un homme sur un toit suit un couple dans la foule avec ce qui ressemble à une grosse longue vue ou un fusil. Il les perd. Cette fois-ci, on est dans la foule, au même niveau que les passants qui défilent. La caméra accroche le couple de tout à l’heure, qui parle de tout et rien. En arrière plan apparait fugacement la silhouette de Caul.

La construction de « The Conversation » est d’une précision remarquable. Coppola a signé un très bon scénario qu’il met en scène avec une attention aux détails exceptionnelle à la fois sur le son bien sûr (c’est le coeur même de « The Conversation ») mais aussi sur l’image. Les décors de San Francisco utilisés pour le film servent également admirablement le film, que ce soit la place d’Union Square, l’entrepôt vide dans lequel Harry a installé son bureau, son appartement impersonnel, l’intérieur en béton de l’immeuble du directeur qui lui a confié la mission d’écoute… Tout est fait pour qu’on embrasse la paranoïa de Caul, plutôt que de la rejeter comme le produit d’un homme instable. On le sait, les années 70 sont la décennie de la paranoïa dans le cinéma américain. Mais là on arrive au sommet du genre ! Avec une histoire simple mais racontée de main de maître.