Une dénonciation du fanatisme religieux et politique, inspirée d’un procès de 1925, qui malheureusement est toujours d’actualité cent ans plus tard

Inherit the Wind (1960)

(Procès de singe)

Réalisé par Stanley Kramer

Ecrit par Nedrick Young et Harold Jacob Smith d’après la pièce de Jerome Lawrence et Robert E. Lee

Avec Spencer Tracy, Fredric March, Gene Kelly, Dick York, Donna Anderson, Harry Morgan, Claude Akins,…

Direction de la photographie : Ernest Laszlo / Production designer : Rudolph Sternad / Montage : Frederic Knudtson / Musique : Ernest Gold

Produit par Stanley Kramer

Drame

128mn

USA

Quand tu regardes un film de 1960 qui s’inspire d’un cas judiciaire de1925 et que tu as l’impression que ce procès aurait pu aussi bien se tenir en 2025, c’est mauvais signe. En 100 ans, on peut t’attendre à ce que la société ait bien changé. Mais  si la science et les technologies ont drastiquement évoluées, il n’en ait pas de même du cerveau humain. Chassez le naturel..

Dans la petite ville (fictive) d’Hillsboro, un professeur Bertram T. Cates (Dick York) est arrêté pour avoir parlé dans sa classe de la théorie évolutionniste de Darwin enfreignant ainsi un loi de l’Etat qui interdit l’enseignement de la théorie de l’évolution dans les écoles publiques. L’arrestation fait la une des journaux et les notables de la ville, conduits par le révérend Jeremiah Brown (Claude Atkins), décident de faire appel à un avocat aussi célèbre que pieux Matthew Harrison Brady (Fredric March), plusieurs fois candidat à la présidentielle. Le journaliste E. K. Hornbeck (Gene Kelly) qui s’apprête à couvrir le procès, convainc son journal de financer un autre avocat Henry Drummond (Spencer Tracy) pour représenter Cates.

Cette histoire est basé sur un procès qui a opposé l’Etat du Tennessee à John Thomas Scopes en juillet 1925, il y a tout juste 100 ans quand j’écris ces lignes. Le Tennessee a été le premier état américain à adopter une loi contre la théorie évolutionniste quelques mois plus tôt, et Scopes a eu le triste privilège d’être le premier à en subir les conséquences. La loi en question ne sera abolie qu’en 1967. Comme on le sait, l’enseignement de la théorie évolutionniste est encore aujourd’hui remise en question régulièrement dans les Etats les plus conservateurs et le sujet revient régulièrement dans l’actualité.

Le personnage du journaliste E. K. Hornbeck est un archétype des médias, avec son regard cynique sur les événements. Pour lui, le procès est perdu d’avance face au fanatisme religieux plombant la mentalité des habitants excités par les discours aussi bien du révérend que de Brady. Mais jusqu’à un certain point. Le révèrent choque quand il renie sa fille (amoureuse de Cates) et Brady quand, poussé dans ses retranchements par Drummond, se pose en prophète.

Pour autant, il est important de noter que la pièce de 1954 sur laquelle est basée le film de Stanley Kramer prend de grandes libertés avec les faits historiques. Les auteurs de la pièce ayant utilisé le procès pour dénoncer plus largement les atteintes à la liberté de penser et comme métaphore du McCarthysme. Il n’en reste pas moins que la démonstration contre le fanatisme dogmatique est menée de façon magistrale.

Drummond, dans un moment de découragement face à la partialité de la population de la ville, demande au juge l’autorisation de se désister car son client déjà condamné, puis s’emporte contre la loi qui est à l’origine du procès :

Une loi injuste ne peut être appliquée impartialement. On ne peut que détruire et punir. Une loi injuste, comme le choléra, détruit tout ce qu’elle touche ! Ses partisans comme ses adversaires ! Comprenez, si c’est un crime d’enseigner l’évolutionnisme dans le public, ça pourrait le devenir dans le privé. Ça pourrait le devenir de s’informer. Et on mettrait à l’index livres et journaux. On dresserait catholiques contre protestants, ,protestants contre protestants, avant d’essayer d’imposer sa religion aux autres! L’un appelle l’autre, ,car il n’y a pas de limite au fanatisme et à l’ignorance !

Je ne suis pas fan des films de procès, mais quand ils sont portés par des acteurs de la trempe de Spencer Tracy et Fredric March, ça change tout. Niveau casting, on notera la présence de Gene Kelly, convaincant dans le rôle du journaliste cynique et de Dick York dans le rôle du professeur emprisonné et jugé (York étant connu du public français surtout pour sa participation à la série « Ma sorcière bien aimée »). L’écriture est excellente et la réalisation de Kramer impeccable. Tous ces éléments  permettant de classer ce « Inherit the Wind » au rang des meilleurs exemples du genre.